L’hippodrome de Dole

Aux XVIIIe et XIXe siècle, le développement des courses hippiques entraîne une multiplication des constructions d’hippodromes. On en compte 51 en France en 1851. L’unique hippodrome du Jura sera dolois et verra le jour en 1900.

La Société de courses du Jura qui gère l’hippodrome a déposé ses statuts l’année précédente : le 2 décembre 1899. Hippodrome semble être un bien grand mot pour qualifier l’aménagement de pistes de course sur le terrain du Pasquier.

À l’époque, pas d’intervention du Ministère des sports mais une autorisation à obtenir auprès du ministre de l’agriculture. Pour ouvrir un champ de courses, la société doit se conformer à la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l’autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux.

Réservé à ses débuts à une portion infime et aisée de la société, une certaine démocratisation de l’hippodrome s’opère au fil du XXe siècle alors que le temps de loisirs augmente.

Plan hippodrome 1908
1904 : création de la Société de courses (statut)

La presse locale témoigne de cette activité

Les chroniques concernant les manifestations à l’hippodrome contrastent avec celles concernant la société de football-rugby (1905) ou la société vélocipédique (1890). L’aspect sportif n’est pas essentiel, ce qui importe c’est que l’événement attire les personnalités qui souhaitent être vues, comme les bourgeois locaux (riches commerçants et industriels), les officiers de la ville ou bien encore les aristocrates de la région.

« Tout Dole était sur la pelouse. Les toilettes fraîches, simplement coquettes comme il sied en plein été, mettaient une note gaie au milieu des complets sombres des hommes, des uniformes chamarrés des officiers ».

Avenir du Jura n° 1924 – 16 juillet 1904

Cette 5e réunion sportive a obtenu un succès dépassant encore celui des précédentes épreuves. Félicitons-en MM. Girardier, notaire, le dévoué trésorier de la Société des Courses du Jura ; Albert Aubier, secrétaire général ; le commandant Astruc, commissaire militaire ; le marquis de Vaulchier, président, et MM. Le marquis de Froissard, le vicomte de Valdahon et le vicomte de Masson d’Autume, commissaires ».

Le vicomte de Valdahon, aristocrate et républicain, est alors président de la Société.

Peu à peu, les habitudes changent et la modernité empiète sur la tradition. Toute personne intéressée peut se rendre à l’hippodrome pour profiter du spectacle et parier, l’activité se démocratise.

« Prix des places : pesage : homme 10fr., dame 5fr. ; Voiture 5fr. ; Pavillon : 2fr. ; Pelouse 0fr.50 par personne ».

(Le Jura Libéral n° 118 – 11 octobre 1908)

L’organisation des courses

La Société des courses participe également à l’amélioration de la race équine. Aux inscriptions, les pièces justificatives attestant de la filiation du cheval se font à :

« l’intention de M. le sous-préfet par l’intermédiaire des maires qui en donneront récépissé ; avant d’être rendues aux intéressés, ces pièces seront remises le matin du concours, pour examen définitif, à M. l’Inspecteur général des haras ou à son délégué ».

(Avenir du Jura n° 2032 – 4 juillet 1906)

Le cavalier, quant à lui, doit certifier de sa disponibilité le jour dit.

« Programme de la réunion qui aura lieu sur l’hippodrome du Pasquier le dimanche 9 octobre 1910 : Première course. – (…) Engagements à Dole, mardi 4 octobre, hôtel de Lyon, chez M. Aubier, avant 2 heures ».

(L’Action Jurassienne n° 190 – 1er octobre 1910)

Dans cette Ville de garnison, souvent le cavalier est un officier qui court au service d’un notable. La réunion du 10 juillet 1904 (La République du Jura n° 27 – 2 juillet 1904) propose six courses séparées de 40 minutes.

Les courses équestres sont programmées de début juin à mi-août, de façon à profiter d’une météo clémente. Les participants viennent de toute la région pour assister à l’évènement et l’économie locale en bénéficie :

« Bonne journée aussi pour les restaurants et cafés de Dole, ainsi que pour la plus grande partie du commerce de notre ville ».

(Avenir du Jura n° 1924 – 16 juillet 1904)

« La facilité des moyens de communications pour Dole, avec Dijon, Chalon, Mâcon, Besançon, etc., permet d’assurer que la foule sera énorme, car les fêtes hippiques sont vraiment trop rares dans nos régions pour qu’on ne profite pas de l’occasion pour cet agréable déplacement ».

(La Croix Jurassienne n° 808 – 8 juillet 1906)

La société de courses semble avoir cessé ses activités à la fin des années 30, à la veille de la seconde guerre mondiale. Dole, petite ville de province, ne peut plus se permettre d’entretenir le modeste hippodrome. 

« (…) C’est un mouchoir de poche… d’un trousseau de princesse ! ».

(Le Jura Libéral n° 660 – 5 octobre 1913)

Progressivement les besoins évoluent et la ville doit investir dans des structures sportives convenant davantage aux nouvelles pratiques adoptées par les dolois.

Ainsi le stade municipal est inauguré en 1954 sur l’emplacement de l’hippodrome, et des terrains d’entraînement sont aménagés à proximité pour la pratique du football, du rugby et de l’athlétisme. Une tribune avec des vestiaires complétera l’installation 3 ans plus tard (le stade Robert Bobin a été mis aux normes en 2018 avec une rénovation de sa pelouse).

A proximité du stade, la Société des sports hippiques nouvellement créée (20/11/1953) entreprend d’organiser un concours hippique national, comme celui des 9 et 10 juin 1957 durant lequel se succèdent les prix suivants :

  • Prix de la Société des sports hippiques de Dole
  • Prix de la ville de Dole
  • Prix du conseil général
  • Prix du souvenir du 14e chasseur
  • Prix de la fédération des commerçants et industriels

Toujours active, la société est installée rue du Bizard au sein du Centre équestre de la forêt de Chaux.

Logo de la Socitété doloise des sports hippiques, installée rue du Bizard au sein du Centre équestre de la forêt de Chaux.
Sa mission : organiser des compétitions et manifestations équestres, aider et promouvoir l’équitation et les sports équestres. Faire de la propagande en faveur du cheval.

En savoir plus :

Dans les coulisses des hippodromes

Vesoul : un hippodrome éphémère chaque dernier samedi du mois d’août
Témoignage : Camille Vallery-Radot, petit-fille de Louis Pasteur, écrit à son père René Valléry-Radot, elle a 9 ans en 1889.

En littérature  :

  • Flaubert, G. (1888). L’Education sentimentale : histoire d’un jeune homme. Paris, Charpentier. Cette description rappelle les stratégies que Gustave Flaubert impose à Frédéric lorsque celui-ci se rend à l’Hippodrome (Flaubert, 1888, Education sentimentale 249).
  • Proust, M. (1919). Un Amour de Swann. Paris, Gallimard. À l’image du cercle proustien des Verdurin (Proust, 1919), les codes horaires sont tacites.
  • Saintyves, G. (1889). À la cravache. Roman de sport. Paris, Dentu.

Sources : 

  • Renaud Jean-Nicolas, « L’avènement hippique jurassien à La Belle Époque : un loisir au goût de tradition », Staps, 2010/1 (n° 87), p. 33-43. DOI : 10.3917/sta.087.0033. URL : https://www.cairn.info/revue-staps-2010-1-page-33.htm 
  • Archives municipales de Dole, Hippisme, cote 3F/31 (1813-1931)